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Hip-hop : Sarah El Yacoubi a fait rayonner Nîmes à l’international

Article et photo : Linda Mansouri

Bercy à 12 ans, finale d‘Arabs Got Talent, félicitations d’IAM. Bienvenue dans l’univers de la danseuse de ‘popping’.

18 bougies et la voilà se mouvant au Conservatoire de Montpellier. Grâce inimitable et musicalité dans les tripes. L’audience en oublie presque l’orchestre de la Philharmonie de Montpellier pour suivre l’élégance en premier plan. Fusion du hip-hop et du classique. « Pour l’anecdote, il y a eu une erreur de musique, elle a improvisé de A à Z », nous conte sa maman Bahija, fierté dans les yeux.

Sarah El Yacoubi, un petit bout de femme qui a toujours crée la surprise. La plus jeune, la plus petite, la seule fille. Autour d’elle, des ‘breakeurs’ aussi féroces que techniques, de la testostérone à souhait. Très souvent, les aguerris ne parient pas un centime, ne la gratifient même pas d’un regard. Les voilà scotchés lorsque la Nîmoise aux bouclettes repart avec le trophée.

En plus d’enchainer les victoires, l’experte de ‘danse debout’ excelle à l’école. Premier semestre de droit validé avec mention. Sarah n’aime pas perdre. Le programme est intense, battle le weekend, entrainement en soirée, lundi à l’école. « J’ai l’impression que la musique me porte, elle est en moi, nous confie la jeune artiste la veille de ses 19 ans. J’aime attirer le regard mais pas sur ma personne, sur ce que je suis capable de faire, ce que je peux procurer comme émotion. »

Michael Jackson et Barry White

A 8 ans, Sarah défie des jeunes de 18, à 10 ans, des hommes de 30. Bercée par la culture urbaine, un temps animatrice radio à Nîmes pour une émission RnB funk, sa maman l’emmène régulièrement à la salle de sport. A 5 ans, Sarah danse devant le miroir, devient rapidement l’attraction. « Enceinte j’écoutais Barry White, Whitney Houston, Michael Jackson », la ‘vibe’ a dû passer à ce moment-là.

Lors d’un battle à Vauvert, le déclic. Sa maman l’inscrit dans une école à Avignon. En parallèle, Samir Achaabany, fervent activiste de la culture urbaine à Nîmes, lui ouvre les portes de sa salle ‘Innova Son Rythme’ rue Vincent Faïta. « Il n’y avait pas de lieu à l’époque pour que les jeunes s’entrainent. S’il n’y avait pas eu cette structure, elle n’aurait pas eu ce parcours », rend hommage Bahija. Auprès de grands frères protecteurs, Sarah se découvre une technique, apprend à parler avec son corps. 

L’aventure Vagabond Crew 

C’est lors d’une compétition mondiale à Toulouse que sa carrière prend vie. Mohammed Zerrouk, administrateur de Vagabond Crew, la repère danser à 9 ans, un pur hasard. Rendez-vous est pris, il descend de Paris à Nîmes avec le fondateur, Mohamed Belarbi, en 2013. « J’étais impressionnée », se rappelle Sarah. Et pour cause, Vagabond Crew est le groupe de danse français le plus titré au monde. Des virtuoses ont été révélés, tel que Salah de l’émission ‘La France a un incroyable Talent’. Sarah est alors la seule fille du groupe.

Sarah El Yacoubi a eu le privilège de danser deux fois à Accor Arena. Photo DR

Elle se lance corps et âme dans la formation Vagabond Lab Occitanie à Montpellier. Durant six ans, entrainement intensif de 10h à 20h, les vacances scolaires et un week-end par mois. Les efforts paient lors des compétitions. Les jurys sont prestigieux, les compétiteurs de haute volée. La maman tente de rassurer : « ce n’est pas grave si tu fais juste un passage, c’est déjà très bien. »  Elle gagne. Dans les mains, un lot de vêtements, trop grands. « C’était du XXL, ils ne prévoient jamais qu’une petite peut gagner », ironise la danseuse. En parallèle, aucune entorse à l’école. « Si tu as de bons résultats, tu continues à t’entrainer, si ça chute, Vagabond Crew te met de côté. C’est une école de vie avec ses valeurs », explique Sarah.

Bercy à 12 ans

La consécration ? Danser sur la scène mythique de l’Accor Arena, anciennement Bercy. A l’occasion de Juste Debout, la plus grosse compétition mondiale de danse debout, Sarah remporte les qualifications à Toulouse dans la catégorie junior. Direction Accor Arena en 2017 pour la finale. A Paris, le monde entier est là, la crème de la crème du hip-hop, du « level ».

Elle perd mais vit un rêve à 12 ans. « Des adultes essaient pendant dix ans de se qualifier pour danser à Bercy », reconnait-elle. Rebelote en 2019 après une qualification à Barcelone. Elle arrive en présélection aux côtés de 70 danseurs sur 400. En demi-finale à Bercy, les danseurs viennent des quatre coins du monde, Asie, Amérique, Europe. « J’étais fière d’elle, elle s’est entrainée seule, dans le couloir de la maison », se souvient Bahija.

Tout juste 19 ans et des battles face à des trentenaires. Photo: DR

‘Arabs Got Talent’

Tout part d’un message. L’émettrice ? La directrice de casting ‘Arabs got talent’ au Liban. « Au départ je croyais à une blague, on me demande une vidéo de Sarah », bel et bien la réalité. Le jury composé de la chanteuse Najwa Karam craque pour la Nîmoise. Pendant une semaine, Sarah enchaine les tournages pour la demi-finale en 2017. Rythme intensif de 6h à 22h pour les prises de vue.

« Dans la chambre d’hôtel, je révisais aussi mes cours les après-midis ! », elle ne lâche rien. Avec Mohamed Belarbi, ils peaufinent l’adaptation du show à la scène. Elle gagne la demi-finale en direct et se retrouve parmi les 8 derniers finalistes sur 400. Elle échoue en finale à 13 ans. Le parcours sonne déjà comme une victoire fracassante.

Félicitée par IAM

Cerise sur le gâteau de la reconnaissance underground, recevoir les félicitations du rappeur légendaire Akhenaton, en décembre 2015 lors du battle ‘Challenge South Concept’ à Marseille dans la catégorie kids. Elle gagne avec son binôme Raphael et voit s’approcher Akhenaton et Shurik’n du groupe IAM. A la clef, de chaleureuses félicitations et une photo souvenir iconique. En juin 2017, Sarah réitère l’aventure. Inscrite dans la catégorie kids, elle concourt finalement avec les adultes et perd en finale contre l’un des meilleurs danseurs au monde dans la catégorie ‘popping’.

Autant d’aventures et le meilleur reste à écrire. Même si la culture hip-hop doit encore gagner ses lettres de noblesse, elle tend à se démocratiser à Nîmes. « Un jeune de Nîmes a ouvert une association hip-hop, Stand’hop, se réjouit Bahija. Les entrainements ont lieu à la galerie Richard Wagner. Et puis il y a Boubou Belbak originaire de la Zup, qui danse dans les clips de Black M ou Clara Luciani », du rêve à la réalité, il n’y a qu’un pas. 

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