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Prep’ Avenir : une bouée pour les publics nîmois fragilisés

Article et photo : Linda Mansouri

Avenue Général Leclerc à Nîmes, Mokhtaria Boujjouf et son équipe viennent à la rescousse des publics vulnérables. 

Remplir une déclaration de revenu, inscrire son enfant à l’école, dresser un CV. Nombre de démarches nous paraissent aisées mais relèvent de l’impossible pour beaucoup de Nîmois issus des quartiers prioritaires. Un équipement désuet, une connexion titubante, ou un français approximatif rendent les choses périlleuses.

Dans ce cocon, plusieurs publics se croisent à Prepa’ Num. Le centre numérique a récemment été inauguré en grande pompe en présence d’élus locaux et de la CAF du Gard qui a financé le projet. Dix nouveaux postes informatiques on fait leur apparition ainsi que trois tablettes et deux téléphones pour réduire la fracture numérique et favoriser l’insertion sociale et professionnelle. En plus du libre accès, des ateliers numériques seront animés par un alternant en Bachelor chef de projet digital, Younes.

Voilà 45 ans que Mokhtaria Boujjouf baigne dans le social. Une mère de famille qui se montre aussi conciliante qu’impitoyable quand il s’agit de défendre ses projets. Elle se démène sans relâche pour ces personnes qu’elle connait trop. « J’ai grandi ici, je connais les difficultés auxquelles les jeunes et les familles sont confrontés », nous dit celle qui a fait ses armes aux Jonquilles et au Secours populaire.

C’est justement ce « désert associatif » dans les années 80 qui forgera son engagement. Sa première action ? Un atelier sociolinguistique. Ils sont d’abord organisés dans un local gracieusement mis à disposition par la Croix rouge.

En 2019, l’association Prep’Avenir déménage avenue Général Leclerc. Ils viennent alors de toute part en quête d’une deuxième chance : Route de Beaucaire, Clos d’Orville, les Oliviers, Haute Magaille, les Jonquilles, Route d’Arles. La solidarité n’a jamais cessé de croitre pour cette structure désormais indispensable à la cohésion sociale. En témoignent les 3 salariés, 4 services civiques, 12 bénévoles et 260 adhérents.

Dispositif CLAS (Contrat local d’accompagnement à la scolarité). Crédit photo : Prep’ Avenir

Mokhtaria Boujjouf, c’est d’abord une générosité humaine. Elle ne compte plus ses interventions pour aider à décrocher un logement, écrire un courrier à un avocat, revoir un contrat de travail.  « Tellement de personnes sont en souffrance alors si je peux aider, je le fais », nous confie-t-elle dans son bureau. Un cheminement qui s’est construit au fil de l’eau et a donné vie à cette récente structure de 5 ans d’âge. Défendre ses projets n’est pas de tout repos. « C’est mon combat de tous les jours », explique celle qui connait tous les rouages des appels d’offres.

L’insertion et l’emploi forment le cœur d’action de Prep’Avenir. Formatrice en FLE, (français langue étrangère), Mokhtaria Boujjouf pointe très tôt du doigt certaines difficultés. « Pour le renouvellement du titre de séjour, un diplôme est désormais nécessaire. En général les hommes réussissent à avoir l’oral car ils discutent au café avec les collègues, ou au travail.  Ce n’est pas le cas des mamans restées au foyer à élever leurs enfants », souligne-t-elle.

La maîtrise de la langue est très souvent un frein pour accéder à des formations qualifiantes. « Pour qu’une personne se sente bien, il faut qu’elle soit formée, insérée dans la vie sociale, professionnelle », voilà pourquoi Prep’ Avenir est née.

Ateliers sociolinguistiques et accompagnement scolaire

Inauguré le 17 décembre dernier, Prepa’Num entend lutter contre la fracture numérique et l’illectronisme. Les 48 enfants pourront entre autres suivre des ateliers sur la maitrise de l’outil Pronote avec leurs familles. Cette salle est dédiée aux adhérents comme aux non adhérents, « on apprend de manière plus ludique et plus rapide avec le numérique ».  Les seniors pourront également utiliser les tablettes et les téléphones pour rompre l’isolement et pouvoir rester connectés avec leurs familles.

A Prep’Avenir, 24 personnes apprennent le français, du niveau analphabète au niveau débutant. L’association leur donne une chance d’être autonome, de prendre un rendez-vous chez le médecin par exemple. Un autre groupe de 12 personnes forment les ASL (ateliers sociolinguistiques) atypiques. Ouvert le soir et le samedi matin, cet atelier permet à des personnes actuellement en emploi de pouvoir perfectionner leur français et s’intégrer dans l’environnement social du pays d’accueil. Ils viennent du Brésil, d’Espagne, du Maroc, d’Algérie, d’Albanie, du Portugal…

Sans compter : ‘Construit ton capital des savoirs’. Cette action est dédiée aux personnes souhaitant aller plus loin dans leur parcours professionnel. « On privilégie un vocabulaire professionnel, des visites à la Chambre des Métiers, au salon Taff par exemple », explique la directrice.

Quant au dispositif CLAS (Contrat local d’accompagnement à la scolarité), 48 enfants du CP jusqu’en classe de seconde sont suivis en soutien scolaire, trois fois par semaine pour une meilleure réussite éducative. « C’est un dispositif très lourd, pour lequel nous avons énormément de demandes. On tente de leur ouvrir l’esprit sur la culture, le patrimoine… », explique Mokhtaria Boujjouf.

La concentration est au maximum… Crédit photo : Prep’Avenir

Quartiers d’été

Naturellement, la présidente s’est rapprochée de l’association HumaNîmes à Valdegour. Depuis deux ans, le Père noël et ses animations font une halte dans les quartiers prioritaires du centre. Idem pour les quartiers d’été : « cela existait sur tous les quartiers sauf sur le nôtre. L’Etat nous a sollicité pour les installer sur notre territoire. C’est une belle action qui demande beaucoup d’investissement et de travail. On reste dans la pédagogie culturelle, artistique, évènementielle, pas uniquement dans la consommation.  Certains n’avaient jamais fait de sorties du type astronomie ou musée par exemple ».

Plongée sous-marine lors des quartiers d’été. Crédit photo : Prep’Avenir

La web-tv Num’Anim

Pour faire la lumière sur ces trajectoires de banlieues couronnées de réussite, la web-tv Num’Anim est née il y a quelques temps. Financé par la fondation Orange, la chaine donne la parole à ces entrepreneurs, artisans et cadres issus de quartiers prioritaires. « On voulait montrer que les quartiers ne sont pas cantonnés à cette image de dealers et de voleurs. Des jeunes sont devenus médecins, infirmiers, avocats ou comptables », tient-elle à préciser.

Un énorme travail de partenariat avec les acteurs locaux a été entrepris. La liste est longue : les Francas, l’Acegaa, le Ceregard, le Pôle santé de la ville de Nîmes, les Compagnons bâtisseurs, Aux 4 Coins des mots, le Carré d’Art, l’ARS, Voyages Culturels, l’EVS rte d’Arles, Comité de Beausoleil, Compagnie Paroles Transparentes, Les Petits débrouillards, CréerCVivre, Negpos, Passeurs d’images, Rebonds…

Atelier sophrologie parents – enfants. Crédit photo : Prep’Avenir

Prep’Avenir doit aussi sa réussite à ses partenaires financeurs : l’Etat, le Département du Gard, la Région Occitanie, la Ville de Nîmes, Nîmes Métropole, Alès Agglo ou la Caf du Gard. L’association dispose également d’une antenne à Alès. Une plateforme pour l’égalité des chances qui a été mise en place en 2019. Objectif ? Accompagner les publics des quartiers prioritaires dans leurs concours pour accéder à la fonction publique des métiers en tension aides-soignantes et auxiliaires-puéricultrices. Pour 2023, l’accent est mis sur l’autonomisation des femmes. Certaines peuvent par ailleurs participer à des ateliers d’Art thérapie et de sophrologie dans le but d’exprimer leurs traumatismes enfouis et de s’émanciper de toute charge émotionnelle.

Tous les lundis matin, une permanence est assurée à Nîmes pour les démarches administratives et l’accès aux droits. Plus de trois cent personnes sont accueillies chaque trimestre. L’Etat finance un poste d’adultes-relais à 80% pour aider les familles dans le cadre de la scolarité. ‘Seul dans le passé, ensemble dans le futur !’, ainsi se décline la devise de l’association.

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